Pandémie de COVID-19 : comment innover dans le secteur de la transformation du bois au Québec?

Winston Churchill a dit : «Il ne faut jamais gaspiller une bonne crise. » Bien que la situation dans laquelle nous sommes tous plongés génère son lot de conséquences néfastes, c’est aussi un moment unique d’innover sur le plan des pratiques en ressources humaines dans le secteur de la transformation du bois au Québec.

À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles

Pour Benoit Lévesque, CRHA, consultant en ressources humaines auprès de diverses entreprises au Québec dont certaines dans l’industrie du bois, le contexte actuel de pandémie de coronavirus commande l’implantation de mesures créatives temporaires.

« Ce contexte actuel, qui amène plusieurs incertitudes, est le moment d’introduire des solutions RH insoupçonnées comme :

  • la modulation des horaires (par exemple, les semaines de travail réduites de 32 heures au lieu de 40 heures);
  • l’horaire de travail comprimé (40 heures en 4 jours);
  • les quarts de travail qui se chevauchent (par exemple, afin de couvrir l’horaire régulier de jour, permettre à un groupe d’employés de débuter à 7 h et de terminer à 14 h, et à un autre groupe de commencer à 9 h et de finir à 16 h);
  • l’aménagement d’horaires de travail réduits (par exemple, 6 heures au lieu de 8 heures). »

« Il faut mettre de côté nos façons de faire traditionnelles de notre conception du travail : nous vivons une situation hors du commun qui bouscule nos certitudes. Tous les moyens sont permis pour être flexible avec les employés, qui doivent eux aussi faire de grands efforts pendant la fermeture des écoles et des garderies. Le défi est de concilier les besoins de production des entreprises avec les besoins de flexibilité demandés par nos employés, tout en agissant selon le contexte d’affaires propre à chaque entreprise. »

À titre de consultant, M. Lévesque est appelé en renfort par plusieurs PME de l’industrie du bois qui commencent à ressentir les contrecoups de cette situation.

« Les employeurs n’ont évidemment pas le contrôle sur l’évolution de la situation globale, mais il ont le pouvoir d’agir de façon transparente et humaine envers leurs employés. Je leur conseille de communiquer clairement et régulièrement avec leur équipe, de donner une certaine visibilité, même si les décisions d’entreprise sont appelées à évoluer rapidement. L’absence de communication laisse un vide qu’il est important de combler. Plus que jamais, il est impératif de structurer l’incertitude », explique-t-il.

Préparer le retour à la normale

Il est encore trop tôt pour prédire un retour au calme. Mais chose certaine, un jour, cette pandémie historique s’estompera et la reprise des activités normales s’enclenchera. Les entreprises qui se seront démarquées comme employeur en sortiront gagnantes.

« Maintenir le lien de fidélisation avec les membres de l’équipe est la clé de la réussite. Au-delà de l’aspect financier, l’introduction de pratiques innovantes créera de nombreux bénéfices, à commencer par la rétention de la main-d’œuvre et le renforcement du lien de confiance entre vous et vos ressources humaines. En tant qu’employeur, vous voulez être en bonne position pour une reprise, avec votre équipe solidement en place, lorsque la pandémie de coronavirus sera derrière nous. Soyons prêts à rebondir! »

D’ici là, diverses mesures d’assouplissement pour les entreprises ont été mises en place par les gouvernements provincial et fédéral.

  • Pour connaître les mesures de soutien aux entreprises annoncées par le Gouvernement du Canada, cliquez ici.
  • Pour consulter les mesures d’assouplissement pour les entreprises offertes par Revenu Québec, cliquez ici.

Également, Formabois se réunit chaque semaine avec son conseil d’administration pour suivre la situation de près et proposer, au besoin, des mesures particulières à la CPMT afin d’atténuer les inconvénients de la situation sur les travailleurs et les entreprises en matière de main-d’œuvre.

Agir maintenant

« Il n’y a pas d’excuse à ne pas agir. Notre quotidien est bouleversé, de toute façon, qu’on le veuille ou non. L’idée, c’est de garder les employés actifs, que ce soit par l’aménagement d’horaires décalés, la formation continue ou le télétravail, par exemple. Qui sait, vos projets d’amélioration des procédés et vos investissements en formation se révéleront peut-être plus profitables que vous ne le pensez! », conclut Benoit Lévesque.

Par Maude Lambert-Bonin, rédactrice pour Formabois

Merci à Benoit Lévesque, CRHA, consultant en ressources humaines chez BLRH inc., pour l’entrevue exclusive accordée dans le cadre de cet article. Pour en savoir plus, visitez le site web de BLRH.

Conseils pratiques pour créer un département RH

Saviez-vous qu’une entreprise de la transformation du bois sur deux n’a pas de direction formelle des ressources humaines? C’est l’un des constats du Diagnostic sectoriel de la main-d’œuvre du secteur de la transformation du bois, publié par Formabois en octobre 2018[1].

Nous avons discuté de cette réalité avec Christine Cholette, directrice générale et des ressources humaines de Dimensions Portes et Fenêtres. Vous l’avez d’ailleurs peut-être rencontrée le 19 novembre dernier lors du Grand Rendez-vous RH manufacturier à Saint-Hyacinthe, alors qu’elle était panéliste sur les différentes méthodes de formation en milieu de travail. Dynamique et chaleureuse, madame Cholette a généreusement accepté de partager avec nous l’histoire de ses débuts chez Dimensions Portes et Fenêtres. En seulement deux ans, elle a assuré, en collaboration avec l’équipe de production et la direction, la création et l’implantation d’un service complet des ressources humaines.

 

Un département des ressources humaines dans notre entreprise, vraiment?

Celle qu’on surnomme encore affectueusement « la scoute » après 15 ans de service n’était pas prédestinée à travailler dans le secteur manufacturier. Titulaire d’un certificat en ressources humaines, Christine Cholette occupait, en 2006, un poste de gestion dans le mouvement du scoutisme. Elle a posé sa candidature chez Dimensions Portes et Fenêtres à Boisbriand afin de se rapprocher de chez elle pour une meilleure conciliation travail-famille.

« Avant mon arrivée, l’entreprise familiale était dirigée par son fondateur, M. Audette, et le chef d’usine. Avec leur équipe, ils s’occupaient de tout : la gestion des horaires des employés, l’évaluation, le recrutement d’employés d’usine à l’aide du journal local et plus encore. Il n’y avait tout simplement pas de département des ressources humaines dans l’entreprise avant 2006 », raconte madame Cholette.

C’est une subvention d’Emploi-Québec qui a changé la donne. Le poste de directeur des ressources humaines a donc été créé et affiché. Ironiquement, madame Cholette n’était pas le premier choix au terme des entrevues, mais elle a tout de même obtenu le poste en fin de compte.

« Lors de ma première journée, j’ai demandé à M. Audette quelles étaient ses attentes pour la création d’un service des ressources humaines. Il m’a répondu : ‘‘c’est toi la spécialiste RH.’’ Ce jour-là, j’ai compris que j’avais un grand défi : organiser par moi-même un département RH de A à Z et démontrer à mes collègues que j’étais là pour les aider », poursuit-elle.

Elle a réussi avec brio! Maintenant, le département des ressources humaines est une équipe de trois personnes. En plus d’être directrice du département des ressources humaines, madame Cholette occupe aussi le poste de directrice générale chez Dimensions Portes et Fenêtres. Elle participe notamment à des salons de l’emploi, à diverses initiatives communautaires et a même développé un partenariat pour la formation des travailleurs avec le CFP des Moulins ainsi que le Comité sectoriel de main-d’œuvre des industries des portes et fenêtres, du meuble et des armoires de cuisine .

 

Comment mettre en place un service RH dans une PME?

Bien sûr, il n’existe pas de recette miracle pour implanter un département des ressources humaines. Chaque entreprise dans le secteur manufacturier est unique. Ceci dit, la discrétion et l’ouverture d’esprit semblent des qualités essentielles pour y parvenir.

« Dès le départ, j’ai pris le temps d’observer mes nouveaux collègues et l’entreprise dans son ensemble. J’ai fait ma place au fil du temps, sans insister ni bousculer qui que ce soit. C’est une belle leçon d’humilité », avoue Christine Cholette en souriant.

Par la suite, le département RH doit agir en complément aux autres départements de l’entreprise. Par exemple, dans l’actuel contexte de pénurie de main-d’œuvre, on compte sur les ressources humaines pour recruter et fidéliser les travailleurs.

Madame Cholette a d’ailleurs développé plusieurs mesures intéressantes chez Dimensions Portes et Fenêtres : club social, rabais corporatifs, rencontre mensuelle des travailleurs avec sondage en début de saison, aide pour les demandes de chômage saisonnier, ententes avec d’autres employeurs pour l’embauche des travailleurs saisonniers pendant la saison morte – pour ne nommer que celles-ci.

Les résultats sont au rendez-vous chez Dimensions Portes et Fenêtres : formation spécialisée de la main-d’œuvre à même l’entreprise pour augmenter l’attractivité du personnel, moins d’usure des machines, baisse du nombre d’accidents de travail et des coûts de CNESST, satisfaction accrue chez les employés actuels et diminution du taux de roulement.

On estime que le secteur de la transformation du bois a connu, en 2014-2015, un taux de roulement moyen de 16 % au Québec, comparativement à 13 % pour l’ensemble des entreprises du Québec et 12 % en ce qui concerne le secteur manufacturier en général (selon le Diagnostic sectoriel de la main-d’œuvre du secteur de la transformation du bois). Les coûts directs et indirects qui en découlent sont non négligeables pour les entreprises : formation liée à l’embauche, diminution de la performance organisationnelle, investissement dans la gestion des ressources humaines, baisse de la productivité des équipes et de la motivation du personnel, perte de savoirs et de connaissances.

 

Quelques ressources pour aider à créer un département RH innovant

Encore aujourd’hui, Christine Cholette et ses collègues au département RH de Dimensions Portes et Fenêtres utilisent les ressources qui sont à leur portée.

« L’idée, c’est de faire preuve d’ouverture et d’aller au-devant. Il existe une foule de ressources peu coûteuses – parfois même gratuites – qui peuvent aider à la mise en place d’un département et de pratiques RH innovantes. Si j’avais un seul conseil à donner, ce serait celui-ci : ouvrez l’oeil, soyez curieux et impliquez-vous dans la communauté. Vous y trouverez des outils insoupçonnés et des solutions audacieuses qui vous feront grandir et qui feront aussi grandir votre entreprise », conclut Christine Cholette, dite « la scoute » .

Par Maude Lambert-Bonin, rédactrice pour Formabois

Merci à madame Christine Cholette, directrice générale et des ressources humaines de Dimensions Portes et Fenêtres, pour l’entrevue exclusive accordée dans le cadre de cet article. Pour en savoir plus sur Dimensions Portes et Fenêtres : http://dimensionspf.com/

[1] GROUPE DDM, 2018. Diagnostic sectoriel de la main-d’œuvre du bois. Rapport présenté à Formabois, 58 p. et annexes. Référence interne : 17-1257.